Traumatisme et transmission JIDV14, 2007

Journal International of Victimology (JIDV14,2007) Ml. Aubignat

 

Répercussions psychopathologiques de la 2ème guerre mondiale sur la 3ème génération.

 

 

 

 

 

Mots clé

Crypte -  fantôme -  identification endocryptique -    objet  transgénérationnel  -  parentification

Résumé

La présente recherche décrit le processus de transmission du traumatisme de la Shoah sur trois générations. Un type particulier d’identification de forme narcissique, à la troisième génération,  décrit l’existence d’une parentification  entravant la résolution oedipienne. L’identification endocryptique mise en place par les petits enfants de survivants, envers l’aïeul survivant,   absorbe toute l’énergie familiale autour de l’objet transgénérationnel obsédant,  objet qui doit rester clivé ou forclos.

Marie-Laure AUBIGNAT, psychologue clinicienne [France]

 

 

  Répercussions Psychopathologiques de la seconde guerre mondiale

sur la troisième génération

 

« Quand on a vécu parmi les morts, quand on a connu la mort, comment dire qu’on est un revenant ? » (Boris Cyrulnik, 2003.)

«Un dire enterré d’un parent devient chez l’enfant un mort sans sépulture. Ce fantôme inconnu revient alors depuis l’inconscient et exerce sa hantise en induisant phobies, folies, obsessions. Son effet peut aller jusqu’à traverser des générations et déterminer le destin d’une lignée. »  (Abraham et Torok, 1996).

Si le soixantième anniversaire de la libération des camps fut un sujet récent sujet d’actualité, encore peu de travaux aujourd’hui, en France, traitent de la transmission du traumatisme sur les descendants de survivants. Quels sont les effets et l’impact de la violence transmise, dans la dynamique familiale, sur la structure de la troisième génération ?

«L’impossible à dire » des survivants  (représentation de mots), est devenu « impossible à penser » (représentation de choses), à la seconde génération du fait de la violence et de l’intensité de leurs traumatismes restés tus. Toute symbolisation langagière demeurant impossible, du fait de l’inavouable torture vécue demeurée encryptée  a conduit les survivants au  silence, bien souvent. Les traces psychiques sont décrites par la seconde génération comme étant un héritage silencieux et pesant  (N. Fresco, 1981).   Selon Abraham et Torok (1996),  «  le travail du fantôme est intimement lié à la définition de Freud de la pulsion de mort ». Afin d’illustrer un des cheminements possibles de la pulsion,  J. Kestemberg (1983) parle du mécanisme de « transposition » où le moi des enfants de traumatisés met en scène le thème principal de « survie » qui envahit leurs fonctions adaptatives et défensives. L’enfant de survivant s’accapare les faits passés et tend à les revivre dans l’actuel, les survivants « confiant » à leurs enfants une part de leur fonction psychique réactionnelle au traumatisme, tentant de revivre les évènements afin d’essayer de les maîtriser. Lebovici (1983) nomme « enfant mandaté », l’enfant de survivant ne pouvant au risque d’éveiller gravement sa culpabilité, se soustraire à la fonction de « réparation » et   d’  « annulation de deuil » que lui confèrent ses parents.

L’individu humain se construisant, en effet,  au travers un système d’identifications successives, donnant accès à des modalités de représentation de soi, où en est le processus décrit, répercuté sur la seconde génération, (H. Epstein, 1979) ? Aujourd’hui, comment réagit la troisième génération ? 

Rébecca

Rébecca, vingt et un ans, est la petite fille de deux grands-parents survivants d’Auschwitz qui retrouvèrent  leur première fille cachée âgée de trois ans à leur retour, elle décèdera à l’âge de dix sept ans.

La mère de Rébecca, seconde fille du couple survivant,  a toujours tenter de « faire taire » sa famille lorsque celle ci commençait à  parler d’Auschwitz. Petite, elle n’écoutait pas ses parents survivants : « tout sortait » et le fait que Rébecca, sa fille aînée, aille voir ses grands-parents très souvent et leur parle tant des sujets qu’elle-même n’a jamais pu aborder, l’étonne.

Au retour d’un voyage à Auschwitz, Rébecca essaie de  faire lire à sa mère ses écrits afin de  la soulager mais ne parvient  pas à lui parler :

« J’ai essayé d'en parler à ma mère parce qu'elle m'a posée une ou deux questions. J’ai écrit pendant le voyage.  Quand elle a  eu fini de lire mes écrits, elle  m'a dit qu'elle était soulagée, que finalement le début de mes lettres était bien plus angoissant que la fin, et que ça l'avait rassurée de voir que j'avais pu changer ma vision des choses, et réussir à me sortir de l'angoisse que je m'auto-créais. Peut être va t-elle finir par faire le voyage elle aussi ». 

Les réactions étonnées de sa mère, lorsque Rébecca va voir ses grands parents renforcent son désir de s’approprier l’histoire de ses grands-parents avec lesquels elle vit un lien particulièrement riche qu’elle décrit comme étant « un privilège ».  Elle exprime aussi le déni vital de sa mère vis à vis de ses parents :

« Elle était obligée. Elle ne pouvait pas rentrer dans la survivance des camps et de la mémoire, Elle ne s’en serait pas sortie. Donc, elle a fait le rejet complètement de ça. Je pense qu’elle s’est protégée. ».

Rébecca a définitivement abandonné les croyances religieuses de son père pour finalement n’être plus croyante, comme ses grands-parents, après leur retour de déportation et le deuil de leur enfant cachée. Rébecca est totalement habitée  par le traumatisme des deux survivants auxquels elle est infiniment liée voire confondue.

La présente recherche illustrée par l’exemple de Rébecca, interroge  le lien transgénérationnel  (représentation de l’aïeul survivant au fil des générations), et tente d’approfondir, l’hypothèse d’une « parentification » mise en place à la troisième génération, ayant comme fonction principale, le ré-équilibrage des frontières entre les générations.

Le Goff (1993) a définit la parentification comme étant « un processus conduisant un enfant ou adolescent à prendre des responsabilités plus importantes que ne le voudraient son âge et sa maturation,  dans un contexte socio historique précis, le conduisant à devenir le  parent de ses parents. Ce processus implique plusieurs générations et plonge ses racines dans les générations des grands-parents, pouvant affecter les générations à venir ». Une identification spécifique est décrite,  du fait d’une ambivalence d’autant plus difficile à surmonter qu’elle est indéfinie, et ce type de lien transgénérationnel semble perturber la qualité du refoulement oedipien. Quel destin parcourent leurs pulsions ? A quel support (objet interne), à quel type d’identification ont - ils recours pour bâtir leur identité ?

Fonction des  fantômes

« Je marche en frissonnant parmi ces fantômes, essayant de ne pas les toucher ; malgré moi, pourtant, je me heurte à eux. On dirait qu’eux même ne cherchent pas à m’éviter,  qu’ils veulent, au contraire, me voir de près ; ils souhaitent que quelqu’un s’occupe d’eux peut-être ». (J.C. Snyders, 2003).

Le concept  de « fantôme » est défini par Abraham et Torok (1996), comme étant « un processus  inconscient,  résultant du passage de l’inconscient d’un parent à celui de l’enfant ».  Sa fonction est différente de celle du refoulé dynamique où le conflit ré apparaît sous forme déguisée, symbolique (symptômes, actes manqués, lapsus). Elle se manifeste par son retour compulsif, périodique sous forme d’objet obsédant, et  s’oppose à l’introjection libidinale, c’est à dire l’appréhension des mots en tant qu’ils impliquent leur part d’inconscient. Au fil des générations, « le travail du fantôme poursuit dans le silence son œuvre de déliaison,  et son apparition traduit  les effets sur le descendant de ce qui avait eu, pour le parent, valeur de blessure, voire de catastrophe narcissique ». Or,  cette « lacune du dicible » semble transformer la structure du sujet. La transmission psychique transgénérationnelle concerne  les objets irreprésentables,  les imagos,  autrement dit le négatif de l’héritage sous forme de secrets, de non-dits. Comment, en effet, mettre en mots l’innommable ?

Topique de la crypte

« Ce lieu qu’il traverse, il ne pourrait le décrire  [...]  Il suit son chemin dans l’ombre, agissant à l’inverse de ce que font les autres, de ceux qui marchent environnés de lumière... »  (J.C. Snyders, 2003)

Le psychisme, n’ayant pu s’approprier l’événement, Abraham et Torok (1996)  considèrent que l’inclusion se fait dans le moi sous la forme d’une incorporation, (inclusion magique et non progressive des pensées, images, affects, de situation traumatique). En conséquence, le refoulement n’est  pas dynamique, c’est à dire sous forme d’un va et vient entre narcissisme et relation d’objet, mais conservateur, c’est à dire l’événement est refoulé une fois pour toutes. Alors, d’un point de vue topique, on a affaire à la « crypte », le lieu du refoulé conservateur. C’est au Moi de l’enfant que revient la fonction de gardien du cimetière. Le passé traumatisant familial est là,  présent dans le sujet, comme un bloc de réalité.

A la troisième génération, ces objets sont transmis  tels quels,  ils n’ont pu être intégrés  par les traumatisés, ni par leurs enfants, et deviennent omniprésents. Rébecca est  stimulée et désire se représenter, allant jusqu’à s’approprier le traumatisme, parfois questionnée par trop de silence ou d’interdits autour de lui. Elle en  décrit  ici  l’omniprésence :

« Je crois que j’aimerais un peu entendre des choses auxquelles ils n’ont même pas réfléchi,  par exemple des questions que je me suis posées. Je crois que ces questions là, elles ne leur ont même pas traversé l’esprit. Mes Grands-Parents, je ne sais même pas s’ils se sont déjà demandés ça : Si eux, ils ne font que survivre ou si finalement, ils ont réussi à vivre et à ne pas pouvoir ressentir ce qu’ils ont eu, à continuer de vivre et ne plus souffrir. Mais finalement, j’y pense tout le temps. Quand j’ai commencé un autre sujet, ça revient tout le temps ! C’est toujours la même question ! C’est ça, j’ai une obsession ».

Une culpabilité  primaire

Rébecca est, d’autre part, attirée par les secrets prégnants, développant en elle curiosité et perplexité ; mais elle se culpabilise de sa curiosité :

« Mes grands-parents n’en en parlaient pas parce que ma mère ne voulait pas qu’on en parle, mais maintenant oui, ils m’en parlent mais  je culpabilise de les faire parler, ce n’est pas parce qu’elle ne voulait pas en parler, mais c’est que c’est tellement fort qu’ils n’arrivent même plus à manger quand ils en parlent. C’est physique, je culpabilise de les pousser trop ».

Lorsque,  souvent,  Rébecca va voir ses grands-parents,  les réactions culpabilisées de sa mère semblent renforcer le désir de Rébecca s’approprier l’histoire traumatisante. L’enfant mandaté (Lebovici, 1983), est  étonnée des questions sa mère :

« Ma mère a l’impression que moi, je pense qu’elle ne s’est pas occupée d’eux, je ne sais pas, c’est quand même  bizarre qu’elle n’aime pas que j’aille les voir. A chaque fois que je rentre par exemple, elle me dit toujours : - mais pourquoi tu vas chez eux ? Tu as l’impression qu’on ne s’en occupe pas ? »

Objet de l’identification

La stimulation  des petits enfants de survivants semble, non seulement dirigée vers l’aïeul, mais tout  autant vers « autre chose » en l’aïeul  : Rébecca  confirme les points de vue       d’H. Faimberg (1988),  définissant l’objet de l’identification comme étant historique et appartenant  à une génération antérieure. L’identification de la troisième génération étudiée, inclut dans sa structure, des éléments fondamentaux de  l’histoire interne de l’objet d’identification, c’est-à-dire la déportation et non pas seulement l’aïeul.               

H. Faimberg nomme ce type d’identification, décrit par Rébecca, condensant trois générations,  le « télescopage générationnel ».  Selon Eiguer (1997) l’objet transgénérationnel est défini comme étant « la représentation d’un objet investi par le sujet, mais aussi du lien de cet objet à son objet interne ».

Mécanismes d’identification

J’ai été, par ailleurs, frappée, dans le discours des  petits enfants  de survivant, d’une part du surinvestissement  de l’aïeul,  mais aussi du récit du traumatisme qui n’est  pas le leur, raconté comme s’ils l’avaient eux-mêmes vécu. Une confusion temporelle et spatiale générationnelle continue d’agir, une sensation que « l’ombre de l’aïeul se réincarne,  dans la personne même du descendant » (Abraham et Torok, 1996). A la seconde génération, N. Zajde (1996) parlait de « mimétisme », au lieu d’identification, et Kestemberg (1983) de « transposition »,  décrivant le fait que l’enfant de survivant s’accapare les faits passés et tend à les revivre dans l’actuel. 

Le processus d’identification est différent, à la troisième génération. A écouter Rébecca, « un fantasme d’empathie identificatoire » (Abraham et Torok, 1996),  accompagné  d’un désir d’appropriation du  traumatisme colore son discours,  lorsqu’elle décrit  son lien à ses grands-parents :

« Des fois je me suis dit : Tout ce que je fais, c’est  survivre  Mais je ne sais pas si c’est par rapport à ça. Moi je crois qu’en fait, je ne suis pas assez enfin... je ne me trouve pas assez contaminée par eux, c’est-à-dire, que je voudrais... voilà !  Je voudrais presque avoir pu être eux». 

Rébecca exprime sa propre identification, fondée sur la volonté de se mettre dans une situation traumatique identique  à celle de ses grands-parents. Le statut de l’identification endocryptique  est  confirmé avec Rébecca,   défini comme étant « un mécanisme consistant à échanger sa propre identité contre une identification fantasmatique à la  vie  d’outre tombe de l’objet » (Abraham et Torok,1996)

Ainsi, les petits enfants de survivants rencontrés, utilisent un mécanisme de défense spécifique, du fait d’une ambivalence d’autant plus difficile à surmonter qu’elle est indéfinie. Rébecca sur-investit ses aïeuls, s’identifiant d’avantage à eux, ainsi qu’à leurs traumatismes incorporés de façon cannibalique,  (plutôt qu’à ses parents). L’identification de Rébecca, teintée de masochisme, intègre des éléments de l’histoire traumatique de ses aïeuls, et semble la conduire à éviter la confrontation oedipienne :

Je me dis : heureusement qu’il y avait mon père ! Le jour où je me suis vraiment aperçue que je n’étais pas croyante, ça a été dur de l’accepter. J’ai toujours été à la synagogue, j’ai toujours fait les fêtes, enfin je les ferai toujours et j’aimerai toujours ça. Mais je ne les fais pas pour ça. Ça, c’est définitivement fini. Ça a été ça qui a été difficile à gérer. » 

Si la place symbolique du père de Rébecca est mise à l’épreuve, (elle a abandonné les croyances religieuses inculquées), il en est de même pour l’identification à sa mère :

« Non,  je ne veux pas lui ressembler. Mes grands-parents ont pu investir leur fille récupérée, mais ils n’ont plus pu aimer leur fille vivante. Il n’y a pas longtemps, ils sont allés faire une conférence, dans l’école où était ma tante et où enseigne ma mère, les professeurs les ont complimenté au sujet de ma mère : Ils ne s’y sont pas du tout intéressé,  ils ont parlé réellement d’autre chose. »

En conséquence, l’identité de Rébecca s’entend inconsciemment comme le « moi fantasmé de l’objet perdu » c’est à dire les camps nazis, mais aussi l’enfant caché, décédé des survivants. Ce double traumatisme, échappant, de par son caractère indicible, à tout travail de deuil, a imprimé à tout le psychisme de Rébecca, une modification occulte. Rébecca s’inscrit dans un processus identificatoire endocryptique, s’identifiant  finalement à la « lacune du dicible » de ses aïeuls.

Destin de l’objet transgénérationnel dans la dynamique familiale

L’identification de Rébecca semble inclure, dans sa structure, des éléments fondamentaux de l’histoire interne de l’objet d’identification, c’est-à-dire la déportation mais aussi le deuil impossible de la fille aînée des survivants. Ce mécanisme identificatoire (« télescopage générationnel »,H. Faimberg, 1988), peut conduire l’enfant à se trouver privé de son espace psychique propre, pouvant devenir l’objet de ce que le(s) parent(s) n’a pas accepté de sa propre histoire, le(s) parent(s) ne  pouvant reconnaître l’indépendance de l’enfant sans le haïr, ne l’aimer que pour s’emparer de son identité positive (tout compte fait, déniée par eux). 

D’un point de vue psychanalytique, on se réfère, pour notre exemple, à deux concepts freudiens majeurs : le narcissisme (fortement corrélé à celui de l’identification) ainsi que celui du masochisme moral (Freud,1924) où les sujets ne sont pas nécessairement à la recherche d’une position de victime, mais comme tout individu,  tentent de s’identifier à leur famille, pour se construire. Ils ressentent alors la nécessité de se ré-inscrire, voire s’approprier en partie les traces de leurs aïeuls intégrant aussi  leur histoire violente, traumatisante. Ainsi, Rébecca a fait le deuil des croyances de son propre père, pour finalement rejoindre fantasmatiquement le double traumatisme  de ses grands-parents maternels : la Shoah et l’enfant décédé. Autrement dit, Rébecca s’identifie à l’un de ses géniteurs, mais plus précisément à celui dont l’objet est enfoui dans son moi clivé : sa famille maternelle. Ceci confirme  les théories de A. Eiguer (1991),  dont je rappelle les bases, avec l’exemple de Rébecca. L’identification de Rébecca, de type narcissique,  peut s’expliquer ainsi : Rébecca a tout d’abord investi les investissements de l’autre : (amour fou et énigmatique de ses grands-parents pour leurs objets internes : les camps, l’enfant mort), et  ensuite s’est  identifiée  à ce narcissisme létal, incluant en elle « porteur du fantôme » et « fantôme ».  Rébecca illustre ce type d’identification absorbant la crypte de ses aïeuls. Elle avait écrit, avant son  voyage à Auschwitz :

« Je ne me voyais plus que comme survivante de la Shoah, je ne me voyais que comme subissant passivement la Shoah, sans pouvoir trouver une issue quelconque, au fait que je n'étais que petite fille de rescapés, je n'avais plus aucun espoir, et je ne vivais plus en tant qu'individu propre, je ne vivais qu'a travers mes grands-parents, je n'étais plus Rébecca, mais j'étais la petite fille de J. et M. German, rescapés de la Shoah... »,  et, de même,  à son retour : « Je rentrais à la maison, moi, moi qui ne croyais ne pas pouvoir revenir des camps. Je crois que je me suis identifiée pendant ce voyage aux Juifs de l’époque : j’ai eu peur, peur de ne pas revenir. C’est bizarre : comme si j’avais été moi-même en danger de mort ! J’ai déjà dit précédemment que je connaissais Auschwitz avant même d’y être allée, que l’endroit m’était familier. »

Conclusion

L’impensable absorbe sa substance narcissique qui investit l’objet (les grands-parents), mais aussi l’objet de l’objet (leur double traumatisme enkysté, ayant la particularité de n’être pas conscient). L’incorporation étant un fantasme, ce fantasme d’essence narcissique, se réfère à une topique secrètement maintenue (la crypte), absorbant le manque, et refusant l’introjection (fin à la dépendance objectale).

La parentification mise en place à la troisième génération peut être définie par l’identification particulière (endocryptique), absorbant l’objet transgénérationnel  devenu premier organisateur du groupe familial (Eiguer, 1997),  sous forme d’un  sur-investissement  narcissique, mettant à défaut la résolution oedipienne.

 

Bibliographie

 

 

Abraham N, Torok M,  (1996), L’écorce et le noyau. Flammarion.

Cyrulnik B. (2003) « le murmure des fantômes » Odile Jacob

Eiguer A. (1991) « l’identification à l’objet transgénérationnel », Journal de la psychanalyse de l’enfant,  10,  93-108.

Eiguer A., (1997), Le générationnel,  apprendre en thérapie familiale psychanalytique. Le psychisme à l’épreuve des générations,  Paris Dunod

Epstein H. (1979), Le traumatisme en héritage - Conversations avec des fils et filles de survivants. La cause des Livres, 2005.

Faimberg  H, (1993), « Le télescopage des générations ». A propos de la généalogie de certaines identifications  in R. KAES et al, Transmission de la vie psychique entre générations. 59-81. Paris Dunod.

Faimberg H (1993),  A l’écoute du télescopage des générations :  pertinence psychanalytique du concept. in R. KAES et al., Transmission de la vie psychique entre générations. 113-129. Paris Dunod.

Fresco  N. (1981)  « La diaspora des Cendres » Nouvelle revue de psychanalyse,  205-220.

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Le Goff, J.F. (1993),  L’enfant, parent de ses parents. Parentification et thérapie familiale. L’Harmattan.

Kestemberg, J., (1980)  Psychoanalysis of children of survivors from the nazi persecution : the continuing struggle of survivors parents, Victomologie, 2 (2-4),  368-374.

Kestemberg, J., (1983)  Psychoanalysis of children of survivors of the holocaust : case presentation and assessment. Journal of american psychoanalytic association,  28,  775-804.

Lebovici, S. (1983)  le nourrisson la mère et le psychanalyste. Les interactions précoces. Paidos, le Centurion.

Snyders, J.C. (2003),  Voyage de l’enfance. PUF 

Zajde  N. (1996),  Souffle sur tes morts et qu’ils vivent.  Odile  Jacob.


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